Le traitement fiscal des dividendes versés par une filiale à sa société-mère

Dans le cadre d’un groupe de sociétés, formé par un ensemble de sociétés contrôlées (filiales) par une même société (société-mère), peut se rencontrer un phénomène de double imposition économique. En effet, lorsque la société-mère perçoit des dividendes de la part de ses filiales, ces dividendes ont été soumis une première fois à l’impôt sur les sociétés (IS) au sein de la filiale distributrice au moment de la réalisation du bénéfice, et seront imposés une seconde fois entre les mains de la société-mère bénéficiaire, en tant que dividendes. 

Le régime mère-fille, régi par les articles 145 et 216 du code général des impôts (CGI) permet d’éviter le phénomène de double imposition économique. Ce régime permet à la société-mère de bénéficier d’une exonération d’IS sur les dividendes qu’elle reçoit de ses filiales à hauteur de 95 %, limitant ainsi la double imposition économique. Ainsi, la société-mère n’est imposable que sur une quote-part de frais et charges dont le montant est égal à 5 % des dividendes reçus. Ce régime fiscal concerne les dividendes, mais également le boni de liquidation, les avances, les droits de souscription, les acomptes ou les emprunts considérés comme des revenus distribués.

Il convient de distinguer le régime applicable aux sociétés-mères et filiales soumises en France à l’IS (I.) et le régime applicable aux sociétés-mères et filiales établies à l’étranger (II.).

I. Le régime applicable aux sociétés-mères et filiales soumises en France à l’impôt sur les sociétés

Tout d’abord, le régime mère-fille est optionnel, en effet, afin d’en bénéficier, une option doit être formulée chaque année sur la liasse fiscale de la société-mère. Cette option prend la forme d’un retraitement à réaliser sur la liasse fiscale.

En outre, afin de bénéficier de ce régime, certaines conditions cumulatives doivent être remplies.

  • La société-mère et la filiale concernées doivent être soumises à l’IS au taux normal de 25 % ou au taux réduit de 15 % pour la fraction de son bénéfice imposable allant jusqu’à 42 500 €.
  • Les titres détenus par la société-mère doivent être nominatifs et comporter un droit aux dividendes. Ils peuvent être détenus en pleine propriété ou en nue-propriété, en revanche, la détention en usufruit ne permet pas de bénéficier du régime (Conseil d’État, 20 février 2012, n° 321224).
  • Les titres doivent être détenus par la société-mère pendant au moins 2 ans. Si la société-mère vient d’acquérir les titres, le régime s’applique dès lors qu’elle prend l’engagement de les conserver pendant au moins 2 ans.
  • Les titres détenus par la société-mère doivent représenter au moins 5 % du capital social de la filiale. Le seuil est porté à 2,5 % du capital et 5 % des droits de vote lorsque la société-mère est contrôlée par un ou plusieurs organisme(s) à but non lucratif mentionné à l’article 206, 1 bis du CGI. Les seuils s’apprécient au moment de la distribution des dividendes.
  • Les dividendes doivent être versés régulièrement, c’est-à-dire dans le respect des règles du droit des sociétés.
  • Les produits distribués ne doivent pas avoir donné lieu à une déduction dans le résultat de la filiale.

Lorsque les conditions sont respectées, le régime mère-fille impacte le résultat imposable de la société-mère par une rectification extra comptable. En effet, il conviendra sur le formulaire cerfa n° 2058 A de déduire fiscalement 95 % du montant des dividendes reçus par la société-mère, et ce, afin que ne soit imposable que la quote-part de frais et charges de 5 %. 

Bon à savoir : Lorsque les dividendes sont distribués entre sociétés appartenant à un groupe fiscal intégré, seule une quote-part de frais et charges de 1 % du montant des dividendes reçus est imposable.

Exemple : Une société-mère et sa filiale réunissent l’ensemble les conditions pour bénéficier du régime mère-fille. La société-mère perçoit 10 000 € de dividendes provenant de sa filiale. Bénéficiant du régime, la société-mère devra déduire extra comptablement 95 % du montant des dividendes, soit 9 500 € afin que ne soit imposable seulement 5 % du montant des dividendes, soit 500 € (10 000 x 5 %).

A contrario, dès lors que les conditions précitées ne sont pas remplies, on constate un phénomène de double imposition économique : les dividendes seront imposés une première fois entre les mains de la filiale qui les verse en tant que bénéfice imposable et une seconde fois entre les mains de la société-mère qui les reçoit en tant que dividendes. 

II. Le régime applicable aux sociétés-mères et filiales établies à l’étranger

Il convient de distinguer deux hypothèses : d’une part, le régime applicable aux sociétés-mères et filiales établies dans un État tiers à l’Union européenne et d’autre part, celui applicable aux sociétés-mères et filiales établies dans un État membre de l’Union européenne.

  • Le régime applicable aux sociétés-mères et filiales établies dans un État tiers à l’Union européenne 

Dans cette première hypothèse, il faut distinguer le régime des dividendes entrants et le régime des dividendes sortants.

On parle de dividendes entrants lorsqu’ils sont perçus par une société-mère établie en France en provenance d’une filiale établie dans un État tiers. Les dividendes sont en principe considérés comme des profits imposables dans des conditions de droit commun.

Toutefois, par exception, une convention fiscale bilatérale peut avoir été conclue entre les deux États, et si tel est le cas, la convention fiscale bilatérale doit s’appliquer dans la mesure où elle prime la législation nationale.

Dans l’hypothèse où la convention fiscale bilatérale reprend la convention modèle de l’organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), celle-ci prévoit un partage du droit d’imposer entre l’État de la source du dividende (c’est-à-dire l’État où la filiale est établie) et l’État de résidence du bénéficiaire (c’est-à-dire l’État où la société-mère est établie). Le partage du droit d’imposer consiste pour l’État de la source du dividende à pratiquer une retenue à la source (la convention modèle de l’OCDE prévoit un taux de 15 %), qui donnera droit à un crédit d’impôt dans l’État de résidence du bénéficiaire. 

On parle de dividendes sortants lorsqu’ils sont versés par une filiale établie en France à une société-mère établie dans un État tiers. Par principe, le 2. de l’article 119 bis du CGI dispose que la filiale doit pratiquer une retenue à la source de 25 %, toutefois, s’il existe une convention fiscale bilatérale entre les deux États qui prévoit un taux différent, c’est ce taux qui doit être appliqué.

  • Le régime applicable aux sociétés-mères et filiales établies dans un État membre de l’Union européenne

Dans cette seconde hypothèse, il faut également distinguer le régime des dividendes entrants et le régime des dividendes sortants.

On parle de dividendes entrants lorsqu’ils sont perçus par une société-mère établie en France en provenance d’une filiale établie dans un État membre de l’Union européenne. Les dividendes sont exonérés d’IS en France dans les mêmes conditions que le régime applicable aux sociétés mères et filiales soumises en France à l’IS.

On parle de dividendes sortants lorsqu’ils sont versés par une filiale établie en France à une société-mère établie dans un État membre de l’Union européenne. Par application de l’article 119 ter du CGI, les dividendes ne sont pas soumis à la retenue à la source de 25 % précédemment citée, lorsque plusieurs conditions sont remplies : 

  • La filiale établie en France doit être soumise à l’IS ; 
  • La société-mère établie dans un État membre de l’Union européenne doit : 
  • Être le bénéficiaire effectif des dividendes ;
  • Avoir son siège de direction effective dans un État membre de l’Union européenne ;
  • Être une société de capitaux ;
  • Être localement imposable à un impôt sur les bénéfices ou à un impôt équivalent ; 
  • Détenir directement, depuis au moins deux ans, 5 % du capital social de la filiale, ou s’engager à détenir ce taux.

Waafa BENSIMOH – étudiante en Master 2 Droit des affaires et fiscalité 2024/2025

Principales sources :

1 réaction sur “ Le traitement fiscal des dividendes versés par une filiale à sa société-mère ”

  1. injection molding procedure Réponse

    Ah, les régimes mère-fille, ces joyeux enjeux fiscaux ! Chaque année, c’est l’option maniaque sur la liasse fiscale, comme si choisir un régime était comme choisir une coiffure pour la rentrée scolaire. On doit être soumis à l’IS au taux normal ou réduit, titres nominatifs et droit aux dividendes, et surtout, les tenir au moins 2 ans, sinon c’est comme un engagement de vie commune qui ne tient pas la route ! Quant à cette rectification extra comptable de 95 %, c’est le petit plus qui fait pencher la balance, comme un jeu de piste fiscaliste où l’on cherche le trésor caché dans les 5 %. Bref, un véritable défi pour les plus malins d’entre nous !injection molding procedure

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