Définition de la caution
L’alinéa 1er de l’article 2288 du code civil dispose que “Le cautionnement est le contrat par lequel une caution s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci.”. En d’autres termes, le cautionnement est une sûreté personnelle par laquelle une personne, la caution, s’engage à garantir le paiement de la dette principale du débiteur en cas de défaillance de ce dernier.
En procédures collectives, depuis la loi du 25 janvier 1985, le législateur a posé le principe selon lequel le cautionnement survit à l’ouverture d’une procédure collective c’est-à-dire à une procédure de sauvegarde judiciaire, de redressement judiciaire ou deliquidation judiciaire. Autrement dit, la caution reste tenue des dettes du débiteur malgré la procédure collective.
La caution en sauvegarde judiciaire et redressement judiciaire
Depuis l’ordonnance du 15 septembre 2021, des règles communes s’appliquent aux cautionnements présents dans les procédures de sauvegarde et redressement judiciaires. En effet, la caution bénéficie de l’arrêt des poursuites individuelles et du cours des intérêts pour les contrats d’une durée supérieure à un an (article L 622-28 du code de commerce). En vertu de l’article L 622-21 du même code, cet arrêt des actions en justice débute dès le jugement d’ouverture.
Néanmoins, la protection de la caution, tout comme le débiteur défaillant, est limitée puisque cet arrêt ne s’applique que dès lors que l’objectif de l’action est d’obtenir le paiement de la dette ou la résolution d’un contrat pour défaut de paiement. Par ailleurs, la suspension des actions ne joue que pour les actions antérieures au jugement d’ouverture de la procédure c’est-à-dire, si elles ont été engagées avant celui-ci (CA Metz, 6e ch., 16 mai 2024, n° 22/01082). De plus, l’arrêt des poursuites ne concerne que les cautions personnes physiques, par conséquent le créancier peut agir contre une caution personne morale.
De surcroît, il existe une autre limite relative à la possibilité de prendre des mesures conservatoires pour le créancier pour éviter l’insolvabilité de la caution (Cass. com., 5 mars 2025, n° 23-20.357). En effet, le créancier peut obtenir un jugement de condamnation contre la caution même dans le cas où la créance n’est pas exigible. A titre d’illustration, il peut s’agir d’une mesure conservatoire ayant pour objectif d’obtenir un titre exécutoire pendant la période d’observation ou la période d’exécution du plan (Cass. com, 14/06/2023, n°21-24.018). Ce jugement n’autorise pas l’exécution forcée puisque la créance n’est pas exigible mais permet de sécuriser les droits du créancier en prenant des garanties notamment sur les biens de la caution. Dans le même sens, l’exécution forcée est suspendue dans le cas où le plan est respecté par le débiteur selon la jurisprudence constante (Cass. com, 1/03/2016, n°14-20.553)
Cette ordonnance a également permis d’étendre la protection des cautions puisque, lorsque le tribunal décide d’arrêter le plan de sauvegarde judiciaire, les personnes ayant consenti une sûreté personnelle, peuvent se prévaloir de ce plan (articles L 622-11 du code de commerce et L 631-14 du même code). La caution peut donc se prévaloir des remises et délais prévus par le plan cependant, cette opposabilité concerne les cautions personnes physiques, et non morales. A noter qu’il n’y a pas de distinction entre les cautions solidaires et simples quant à l’application de ces articles.
La caution en sauvegarde judiciaire
La particularité de la sauvegarde judiciaire est que la caution doit déclarer sa créance à la procédure (article L 622-24 du code de commerce), sinon elle ne sera pas opposable. Ainsi, si la caution ne déclare pas sa créance, elle ne pourra réclamer le remboursement de ce qu’elle a payé.
A contrario, en liquidation et redressement judiciaire, l’absence de déclaration n’empêche pas le remboursement de la caution puisque la créance est opposable à la caution.
La caution en liquidation judiciaire
En liquidation judiciaire, contrairement à la sauvegarde et au redressement judiciaire, la créance garantie devient immédiatement exigible par conséquent, des poursuites peuvent être engagées car la créance est postérieure à la procédure. Ainsi, les garants peuvent être poursuivis par les créanciers du débiteur en liquidation judiciaire (Cass. com, 1/07/2020, n°18-41.979).
A noter qu’un arrêt important du 11 septembre 2024 effectue un revirement de jurisprudence sur l’exigibilité d’un compte courant (Cass. com., 11 septembre 2024, n° 23-12.695). En effet, désormais, un compte courant qui n’est pas clôturé lors de l’ouverture de la liquidation judiciaire est considéré comme un contrat en cours. De ce fait, l’ouverture d’une liquidation, qui empêche sa clôture automatique, ne rend pas exigible la créance par conséquent, le créancier ne peut poursuivre la caution.
Également, la caution ne bénéficie pas de l’inopposabilité des créances non déclarées (article L 641-3 du code de commerce). En d’autres termes, si le créancier n’a pas déclaré sa créance à l’administrateur judiciaire, il ne peut plus agir contre le débiteur mais celui-ci peut agir contre la caution. La caution n’est donc pas autant protégée que lors d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire.
L’article L 642-12 du code de commerce prévoit, qu’en cas de plan de cession d’une entreprise en liquidation judiciaire, la sûreté garantissant un prêt qui a permis de financer un bien de l’entreprise est transmise au cessionnaire. La caution reste donc tenue, elle n’est pas libérée automatiquement hormis lorsque le contrat de cautionnement subit une modification substantielle (Cass. com, 29/09/2015).
Cependant, la réforme du droit des sûretés de 2021 a créé un débat doctrinal à ce sujet en raison de la nouvelle rédaction de l’article 2298 du code civil. En effet, le législateur a ajouté à cet article que la caution ne bénéficie pas des exceptions dont dispose le débiteur s’il s’agit de “mesures légales ou judiciaires” prises. Or, une partie de la doctrine considère que la cession de dette qui résulte du plan de cession ne relève pas de ces mesures. Dès lors, la caution pourrait être libérée en vertu de l’article 2298 du code civil.
Enfin, l’article L 642-12 du code de commerce prévoit que lorsque le cessionnaire s’engage à prendre en charge les échéances à venir des crédits en cours, le débiteur cédé est libéré de ces échéances. Ainsi, cette libération s’étend aux cautions qui garantissent des dettes.
A noter que la caution conserve les droits de recours habituels prévus par le code civil si celle-ci a payé à la place du débiteur selon l’article L 633-11 II du code de commerce. Ce droit de recours subsiste même après la clôture de la procédure de liquidation pour insuffisance d’actif (Cass. com, 28/06/2016, n° 14-21.810). En effet, l’objectif est de ne pas faire supporter définitivement le poids de la dette sur la caution. De manière plus précise, cet arrêt affirme que ce droit d’agir en remboursement vaut peu importe que la caution agisse par recours personnel ou par subrogation, qu’elle ait payé avant ou après l’ouverture de la procédure collective, qu’elle ait obtenu un titre exécutoire avant cette ouverture.
Noémie PIERMANT – étudiante en Master 2 Droit des Affaires et Fiscalité
Sources:
Code de commerce
Procédures collectives – Arrêt des poursuites et mesures conservatoires contre la caution – Commentaire par Caroline Houin-Bressand
Les droits de plus en plus obérés des créanciers : retour sur l’arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 11 septembre 2024, R. KTORZA
La caution à l’épreuve des procédures préventives et procédures collectives, 3/02/2024
Sauvegarde, Redressement et liquidation judiciaire – JJ. Fraimout, 14/05/2024.
Reprise des poursuites par la caution après clôture pour insuffisance d’actif, Lefebvre Dalloz, 4 juillet 2016