L’exonération fiscale et sociale temporaire des pourboires

Dans de nombreux secteurs, notamment celui de la restauration et de l’hôtellerie, il est d’usage que les salariés au contact de la clientèle reçoivent des pourboires en guise de reconnaissance de leur travail. Ces derniers constituent une rémunération, au même titre que les salaires versés par les employeurs.

De plus, l’article L3244-1 du code du travail dispose que si le pourboire est perçu par l’employeur, celui-ci est tenu d’en reverser le montant intégral au personnel travaillant en salle.

Habituellement, les pourboires sont perçus en espèces et ne sont pas déclarés par l’employeur. Néanmoins, depuis la crise du Covid-19, les habitudes des consommateurs ont changé. En effet, il est fréquent que le paiement sans contact soit privilégié au moment du règlement. Cela oblige donc les employeurs à déclarer les pourboires perçus de façon numérique. Corrélativement, cela va augmenter l’assiette de l’impôt des salariés, ce facteur pouvant freiner les potentiels candidats, pourtant recherchés dans ce domaine d’activité.

En effet, certains professionnels rencontrent des difficultés à recruter du personnel. C’est le cas notamment pour le secteur de la restauration, des cafés et de l’hôtellerie (aussi appelé CHR). Les consommateurs souhaitent désormais se faire plaisir et passer plus de temps à table, cela entrainant une hausse des couverts. Pour satisfaire à cette demande, les employeurs ont besoin de plus de main d’œuvre. Néanmoins, de nombreux salariés ont quitté le secteur dans le but de changer de métier durant la crise afin d’en éviter les nombreux inconvénients (pénibilité du travail, rémunération peu attractive, horaires décalés). Il est aujourd’hui compliqué de trouver des travailleurs motivés et qualifiés.

Par conséquent, afin de favoriser une reprise d’activité favorable, les membres de la Commission des finances de l’Assemblée nationale ont voté le 5 octobre dernier un amendement au projet de loi de finances pour 2022, présenté par Jean-Noël Barrot, député Modem des Yvelines et vice-président de cette Commission.

Celui-ci a été validé par l’Assemblée nationale le 12 octobre en première lecture du projet de loi de finances pour 2022.

Il vise notamment à remettre le pourboire dans les habitudes des Français, de rendre ces métiers plus attractifs par le biais de leur défiscalisation et d’inciter leur déclaration, car dans la majorité des cas, les pourboires sont versés en espèces et ne sont pas déclarés par l’employeur, ils échappent donc aux cotisations et à l’impôt.

En l’état actuel de la législation, les pourboires, quelle que soit leur modalité de paiement, sont toujours imposables à l’impôt sur le revenu pour leur montant réel dans la catégorie des traitements et salaires (article 79 du Code général des impôts). De plus, en vertu de l’article L136-1-1 du Code de la sécurité sociale, ils sont également soumis aux prélèvements sociaux.

Néanmoins, ces pourboires représentent parfois une partie importante de la rémunération totale.

Ce projet de loi prévoit donc une défiscalisation des pourboires perçus entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023. De plus, afin d’éviter que les pourboires viennent se substituer à une rémunération, la mesure s’appliquera aux salariés percevant « une rémunération n’excédant pas le salaire minimum de croissance majoré de 60% », soit 1,6 SMIC. Cette nouvelle règlementation s’appliquera à toutes formes de paiement.

Ce dispositif concernera les professions salariées en contact avec la clientèle.

Cette disposition pourra rendre les professions en contact avec la clientèle plus attractives. En effet, leur assiette d’imposition ne sera plus, désormais, augmentée par les pourboires perçus.

Néanmoins, seul le problème de la rémunération est ici traité. Pour que le secteur attire de nouveau les travailleurs, d’autres questions restent à se poser. Les employeurs devront certainement ajuster leur manière de recruter en l’adaptant au monde du travail d’aujourd’hui, en rendant notamment leurs entreprises plus attractives pour les salariés, ou encore en proposant davantage de formations.

Pour aller plus loin : Amendement n° I-CF1068 

Solenne Marillier

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *