Le fonctionnement du compte courant d’associé

Malgré l’importance du compte courant d’associé en comptabilité et ses enjeux fiscaux, il n’y a pas de définition légale de celui-ci. Le sens de cette notion a été apportée par une réponse ministérielle : « L’apport en compte courant consiste pour l’associé à consentir à la société des avances ou des prêts en versant directement des fonds ou en laissant à sa disposition des sommes qu’il renonce provisoirement à percevoir » (Rép. min. n° 34969 : JO Sénat 23 oct. 1980, p. 4001, M. de Cuttoli)

En somme, c’est le fait, pour un associé, de fournir à la société des fonds supplémentaires à ceux constituant du capital social déjà apporté. Il s’agit d’un moyen de financement et d’apport de fonds constituant une alternative par rapport aux apports en numéraire directement effectués dans le capital social de la société.  

Il est possible d’évoquer trois grandes règles de fonctionnement  : 

  • La première règle concerne le principe d’interdiction d’un fonctionnement en position débiteur pour certains associés dans des formes sociales de société prévues aux articles L223-21, L225-43 et L225-91 du Code de commerce. 
  • La deuxième règle consiste en une indépendance de la cession des comptes courants et des titres sociaux. Cette indépendance se situe dans le prolongement de la dissociation des qualités de créancier et d’associé. La cession des titres sociaux (actions et parts sociales) n’entraîne pas la cession des comptes courants d’associés (Cass. Com. 11 janvier 2017, n° 15-14.064). 
  • La troisième règle est celle de l’incorporation des comptes courants dans le capital social. En effet, une décision unanime des associés est nécessaire : 
  • Soit afin de permettre la libération totale du capital par compensation avec le compte courant.
  • Soit dans l’hypothèse d’un redressement judiciaire, sauf clause contraire des statuts, il peut être réalisé une augmentation de capital par incorporation des comptes courants correspondant à des créances liquides et exigibles (Cass. com., 17 mai 1994 : RJDA 8-9/1994, n° 934).  

Pour le reste des règles relatives au fonctionnement, les comptes courants sont souvent aménagés de manière contractuelle.  

Concernant le remboursement du solde créditeur du compte et par application du principe de l’autonomie de la volonté contractuelle à la convention du compte courant, un associé peut demander à tout moment le remboursement du solde créditeur de son compte (Com. 10 mai 2011, n°10-18.749). Autrement dit, sauf disposition conventionnelle contraire, telle qu’une convention de blocage, les titulaires de comptes courants d’associés bénéficient d’un droit au remboursement immédiat et intégral de leurs comptes, même en cas de difficultés financières de la société (Com. 8 déc. 2009, n°08-16.418). Le compte courant se différencie donc de l’apport en numéraire effectué directement en capital social qui ne peut être remboursé immédiatement et à tout moment.  

D’un point de vue fiscal, il est important de distinguer le type d’imposition de la société ainsi que le caractère débiteur ou créditeur du compte courant d’associé.  

Dans une société soumise à l’impôt sur les sociétés, lorsque le compte courant d’associé est débiteur, cela signifie que le dirigeant personne physique a une dette à l’égard de la société. Le solde du compte constitue un revenu distribué pour le dirigeant personne physique. Il sera donc imposé soit au prélèvement forfaitaire unique, soit au barème progressif de l’impôt sur le revenu, s’il opte pour ce type d’imposition. Néanmoins, il peut contester cette imposition s’il parvient à démontrer qu’il a déjà commencé à rembourser le compte par des apports effectués en compte courant d’associé.  

Lorsque le compte courant d’associé est créditeur au sein d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés, il peut donner lieu à rémunération grâce aux intérêts. Le taux d’intérêt est fixé en assemblée générale ordinaire. Le dirigeant personne physique sera alors imposé au prélèvement forfaitaire unique ou au barème progressif de l’impôt sur le revenu s’il opte pour ce régime. Il est à noter que les intérêts peuvent être déductibles du bénéfice imposable de la société lorsque le capital social est intégralement libéré et que le taux de rémunération des comptes courants ne dépasse par la limite fixée par la loi. La limite correspond à la moyenne des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit, pour des prêts à taux variable aux entreprises d’une durée initiale supérieure à deux ans, soit au premier trimestre 2022 un taux effectif de 1,15%. 

Dans une société de personnes soumise à l’impôt sur le revenu, lorsque le compte courant est créditeur, il peut donner lieu à rémunération mais les intérêts sont imposables en fonction de la nature de chaque associé. Quant au solde débiteur, il ne donne pas lieu à une distribution en raison de la transparence de la société et de l’imposition du résultat fiscal au niveau de chaque associé.  

Toutefois, l’administration fiscale pourra être amenée à constater une renonciation à produit en présence de solde débiteur (et de non-comptabilisation de produits financiers) et donc l’existence d’un acte anormal de gestion et procédera à la réintégration de ces produits au niveau du résultat fiscal de cette société. 

Ludivine RICHY 

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