La société à mission

« Il faut modifier le code génétique des entreprises en désignant un autre objectif que le partage du profit entre associés. »

Emmanuelle Faber, directeur général du groupe Danone

La loi PACTE du 22 mai 2019 vise la croissance et la transformation des entreprises mais également à reconsidérer leur place dans la société. La qualité de société à mission a été introduite à l’article 176. 

Une société à mission est une entreprise qui souhaite mettre son activité au service d’une mission sociale ou environnementale. Cette dernière va prendre en considération l’intérêt général, autrement dit les impacts environnementaux, sociaux et sociétaux liés à son activité, en plus de rechercher une certaine efficacité économique. 

  1. Obtention de la qualité de « société à mission » 

Quelle que soit leur forme juridique, toutes les sociétés peuvent bénéficier de la qualité de société à mission, sous certaines conditions. 

Pour pouvoir bénéficier de cette qualité, ces dernières doivent inclure certains éléments dans leurs statuts tels que : 

  • les objectifs sociaux et/ou environnementaux,  
  • la raison d’être de l’entreprise, 
  • les modalités de suivi de l’exécution de ces missions. 

Ainsi, la société à mission dévoile au public : sa raison d’être et ses objectifs environnementaux ou sociaux. De plus, même s’il y a un changement de direction ou d’actionnariat, la mission est inscrite dans les statuts ce qui permet de sécuriser sa mise en œuvre. 

Les sociétés, qui disposent de plus de 50 salariés, doivent mettre en place un comité de mission. Ce dernier procède au suivi des missions effectuées par l’entreprise et veille à la considération des intérêts environnementaux ou sociaux dans sa prise de décisions. Ce comité doit comporter au moins un salarié. 

L’entreprise doit effectuer une déclaration de sa nouvelle qualité de société à mission au greffier du tribunal de commerce, lors de sa création ou au cours de sa vie avec une demande d’inscription modificative. Cette nouvelle qualité sera alors mentionnée sur la base de données des entreprises et des établissements et au répertoire Sirene. 

  1. Un engagement fort 

L’entreprise, ses dirigeants et actionnaires, s’engagent formellement à réaliser ses missions avec tous les moyens nécessaires. Ces moyens peuvent êtres humains, financiers ou encore logistiques.  

Afin d’établir une vérification du respect de ces missions, le décret du 2 janvier 2002 permet à un organisme tiers indépendant de rendre un avis. Il peut procéder à des vérifications en ayant accès à tout document utile détenu par la société, et notamment au rapport annuel fait par le comité de mission. 

Les organismes accrédités par le Comité français d’accréditation (COFRAC) ou tout autre organisme d’accréditation signataire de l’accord de reconnaissance établi par la coordination européenne des organismes d’accréditation pourront désigner cet organisme tiers indépendant. Ce dernier établira si la société en question a bien rempli, ou non, ses missions. 

Si la société n’honore pas ses objectifs, l’organisme tiers indépendant signalera pourquoi les objectifs n’ont pas été atteint ou, à défaut, pourquoi il lui a été impossible de parvenir à une quelconque décision. 

Enfin, toute personne intéressée ou le ministère public peut demander qu’une procédure de retrait de la qualité de société à mission soit établie, auprès du président du tribunal de commerce. Le président du tribunal de commerce compétent pourra alors commander au représentant légal de supprimer cette qualification dans les documents où figure cette mention. 

  1. Avantages 

La société ayant opté pour la qualité de société à mission en tire plusieurs avantages : 

Ambition commune 

Une ambition commune permet à chaque personne qui compose la société (salariés, dirigeants, partenaires…) d’avoir des objectifs communs, lesquels permettent de renouer des liens de confiance. On peut parler d’objet d’intérêt collectif puisque ces missions d’ordre social ou environnemental se réaliseront en concertation avec les parties prenantes. Cela donne lieu à une dynamique collective.  

En outre, cette ambition commune permet de diriger les décisions de développement et d’investissement, de même que les décisions opérationnelles et stratégiques de l’entreprise. 

L’image de marque :  

Les consommateurs sont de plus en plus sensibles à l’image de marque que renvoient les entreprises. S’engager dans des objectifs sociaux, environnementaux et sociétaux peut alors lui être vraisemblablement favorable.  

Les consommateurs seront plus enclin à se tourner vers une entreprise qui prend en compte les valeurs de la société. Les entreprises sont amenées à faire face aux exigences croissantes de leur écosystème quant à leur rôle sociétal, ce qui peut être un atout en matière de notoriété. 

Une collaboration avec une pluralité d’acteur :  

Au sein d’une entreprise, les parties prenantes seront amenées à travailler ensemble dans un objectif commun.  

Cette dernière sera enclin à collaborer avec des partenaires ayant le même objectif ou eux-mêmes influencés par cette dernière. En effet, cela peut générer un phénomène de miroir et inspirer d’autres entreprises à s’associer à une mission sociale ou environnementale notamment en communiquant ses valeurs. 

De surcroit, certains investisseurs se tournent davantage vers les entreprises ayant un « intérêt général » qui est une qualité associée à la performance économique, financière et à la stabilité.  

Amélioration de la performance économique

Les sociétés à mission misent davantage sur une performance à long terme, ce qui peut participer à leur pérennité, notamment grâce à l’innovation. 

Protection contre les rachats hostiles

Les dirigeants peuvent s’opposer à certaines offres publiques, notamment dans le cadre d’une offre publique d’achat, en argumentant une « incompatibilité existentielle ». 

Amélioration de la marque employeur

Pour les salariés, cet objet peut déclencher un levier de motivation et donc de performance. 

D’après une étude établie par BNP Paribas et The Boson Project, une partie des salariés de générations Y et Z sont davantage séduits par une entreprise possédant une valeur éthique.  

Une entreprise ayant la qualité de société à mission fidélise non seulement ses clients mais également ses salariés cherchant un sens à leur activité. Encore une fois, cela contribue à la marque employeur et à l’image de marque. 

  1. La réussite des sociétés à mission 

Il est certain que cette qualité séduit un nombre croissant d’entreprises.  

En effet, en France, on compte 505 sociétés à mission en 2021, alors qu’elles n’étaient que 207 en 2020. L’attractivité de ce modèle juridique est alors démontrée. 

Tous les avantages suscités expliquent pourquoi des entreprises se tournent vers la qualification de société à mission. 

De surcroit, ces dernières sont de plus en plus sensibilisées aux questions sociétales, environnementales ou sociales.  

Ainsi, même si certaines entreprises ne se tournent pas vers la société à mission, elles mettent en œuvre des projets et démarches audacieuses. Cela peut notamment se traduire par des projets de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). 

Adeline BRUNEAU

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