L’émergence des nouvelles technologies et la digitalisation transforment tous les aspects de notre société, y compris le transport des marchandises.
La lettre de voiture est le document qui matérialise le contrat de transport de marchandises. Lorsqu’il s’agit de transport international, on parle de “lettre de voiture CMR” en référence à la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (convention CMR) de Genève, datant du 19 mai 1956.
Bien que le contrat de transport soit consensuel, la lettre de voiture est essentielle, notamment à titre probatoire, en effet, elle constitue la preuve du contrat de transport, elle formalise l’accord entre les différentes parties au contrat de transport.
Ce document mentionne toutes les parties prenantes ainsi que les informations cruciales sur les marchandises transportées. La lettre de voiture accompagne obligatoirement la marchandise tout au long de son transport et peut être demandée par les autorités (douane, contrôleurs routiers, etc.). En cas de non-présentation de celle-ci par le transporteur, ce dernier risque des sanctions (amendes et immobilisation du véhicule).
Elle facilite la vérification des informations sur la marchandise et en cas de litige, sert de cadre légal crucial et inhérent à l’instruction d’un recours.
Concernant la lettre de voiture électronique ou E-CMR, elle a été introduite par un protocole additionnel du 20 février 2008 à la convention CMR, qui vise à moderniser les pratiques de transport en introduisant une alternative numérique à la lettre de voiture papier.
La lettre de voiture est utilisable dans le cadre de tous les contrats de transport relevant de la convention CMR.
Elle a la même valeur probante et produit les mêmes effets que la lettre de voiture classique, sous réserve de remplir toutes les formalités nécessaires mentionnées par le protocole additionnel.
En effet, l’authentification de la lettre de voiture électronique par les parties est nécessaire, l’E-CMR doit être signée par des moyens électroniques, fiables, permettant d’assurer son intégrité, d’identifier le signataire, et de détecter toute modification ultérieure.
Le protocole définit la signature électronique comme “des données sous forme électronique qui sont jointes ou liées logiquement à d’autres données électroniques et qui servent de méthode d’authentification”.
À noter que les États et leurs législations nationales peuvent prévoir et autoriser d’autres moyens d’authentification.
Le contenu de l’E-CMR est identique à celui de la lettre de voiture classique. De plus, le procédé utilisé par les parties, pour mettre en place la lettre de voiture électronique, doit assurer l’intégrité des informations qu’elle contient dès sa première version définitive.
L’intégrité des informations est assurée lorsqu’elles restent complètes et non modifiées, sauf pour les ajouts ou modifications effectués dans le cadre normal de la communication, de la conservation ou de la consultation.
Par ailleurs, les informations contenues dans la lettre de voiture électronique peuvent être mises à jour ou changées lorsque les circonstances le permettent et si les conditions établies par la convention CMR sont respectées.
De plus, lors de chaque ajout ou modification d’informations, le procédé utilisé doit permettre leur identification. Par conséquent, les informations ajoutées et/ou modifiées doivent pouvoir être identifiées afin de garantir le caractère authentique des informations présentes sur l’E-CMR originale.
Les parties gardent ainsi une certaine liberté, quant à l’établissement et à la mise en œuvre de l’E-CMR, à condition de se conformer aux formalités.
Une obligation pèse sur le transporteur sur demande de l’expéditeur, en effet, il sera éventuellement amené à fournir un récépissé des marchandises ainsi que toutes les informations nécessaires pour identifier l’envoi et accéder à la lettre de voiture électronique.
En France, ce protocole a été ratifié par le décret n° 2017-1 du 3 janvier 2017.
À première vue, l’E-CMR semble être une véritable avancée, permettant notamment une meilleure fluidité du suivi du transport et un accès illimité à la lettre de voiture, dans la mesure où les parties peuvent y accéder à tout moment. Ainsi, cette dématérialisation permet une meilleure traçabilité et une meilleure célérité de la chaîne d’approvisionnement, de sorte que le suivi du transport de la marchandise s’en trouve facilité.
Ensuite, il est juste d’affirmer que l’E-CMR contribue à une certaine transparence des parties par les formalités numériques qu’elle impose. Néanmoins, l’E-CMR n’est pas à l’abri d’éventuelles falsifications. En effet, la modernisation de la société et le développement des nouvelles technologies entraînent pareillement le développement de nouveaux procédés de détournement ouvrant la possibilité pour des hackers de détourner la lettre de voiture, risque quasi-inexistant pour la lettre de voiture classique.
Il sera donc nécessaire, pour la pleine efficacité de l’E-CMR de mettre en place un système informatique favorisant la protection des données qu’elle contient. De ce fait, la mise en œuvre de procédés d’authentification, d’intégrité et de protection des données efficaces est cruciale pour éviter l’émergence de litiges supplémentaires sur ces questions.
Houleye THIAM – étudiante en Master 2 Droit International Parcours Douanes et Transport
Sources :
PROTOCOLE ADDITIONNEL À LA CONVENTION RELATIVE AU CONTRAT DE TRANSPORT INTERNATIONAL DE MARCHANDISES PAR ROUTE CONCERNANT LA LETTRE DE VOITURE ÉLECTRONIQUE
Décret n° 2017-1 du 3 janvier 2017 – portant publication du protocole additionnel à la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route concernant
la lettre de voiture électronique