La crise sanitaire de la COVID 19 a fortement impacté l’économie générale, nombreuses professions ont alors été mises en lumière telle que la restauration. Mais certaines ont vu les conséquences de ladite crise sur leur économie mises sous silence, notamment pour les domaines touchant à l’audiovisuel. Le Centre National de la Cinématographie a constaté fin 2020 une chute de 61,9% de spectateurs en salle, pourcentage lié à de nombreux mois de fermeture des salles de cinéma.
Afin de remettre le monde du septième art sous les projecteurs, l’État a mis en place un crédit d’impôt créé par l’article 49 de la loi de finances rectificative pour 2020 du 30 juillet 2020 et codifié à l’article 220 sexies A du Code général des impôts (CGI ci-suit). Ce crédit d’impôt qui est entré en vigueur le 16 juin 2021 est destiné à pallier les dépenses de création audiovisuelle et cinématographique, redevances versées aux organismes de gestion collective et rémunérations versées directement aux auteurs dans un contexte où les rentrées d’argent ont été réduites. Ce dispositif fiscal vise à réduire le montant brut de l’impôt à payer et peut entrainer un remboursement de la part de l’Etat. Dans ce dernier cas, le crédit d’impôt devient une créance que détient le contribuable envers l’État.
1- Conditions d’éligibilité
Afin d’être éligible audit crédit d’impôt, les entreprises sont soumises à des conditions posées par le législateur dans sa loi de finances rectificatives qui sont les suivantes :
- La première condition tient à l’activité même de l’entreprise, puisqu’en effet elle doit exercer une activité d’éditeur de services de télévision, de services de radio ou de services de médias audiovisuels à la demande ou bien être un organisme de gestion collective (organisme dont « l’objet principal consiste à gérer le droit d’auteur ou les droits voisins de celui-ci pour le compte de plusieurs titulaires de ces droits, […] à leur profit collectif » art L321-1 du Code de la propriété intellectuelle).
- La deuxième condition tient au régime d’imposition. L’entreprise doit être imposée au régime de l’impôt sur les sociétés (IS ci-suit) et non à l’impôt sur le revenu (IR ci-suit). Cette condition peut être à la défaveur de certains auteurs qui voient leurs rémunérations imposées à l’IR dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.
- La troisième et dernière condition tient à la diminution du chiffre d’affaires de 10% minimum sur la période allant du 1er mars 2020 au 31 décembre 2020. Toutefois, la diminution doit s’analyser au regard du chiffre d’affaires effectué sur la période allant du 1er mars 2019 au 1er décembre 2019.
2- Crédit d’Impôt (art 220 sexies A II CGI)
Le crédit d’impôt correspond à 15% du montant total des dépenses éligibles faites par les entreprises entre le 1er mars 2020 et le 31 décembre 2020. Les dépenses composants la base du calcul de ce crédit, énoncées à l’article 220 sexies A, II du CGI, doivent avoir été engagées dans un État membre de l’Union Européenne ou dans un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen (Lichtenstein, Islande, Norvège), et sont les suivantes :
- Achat des droits de diffusion des œuvres,
- Investissement en parts de producteur dans le financement des œuvres,
- Financement des travaux d’écriture et de développement des œuvres,
- Adaptation aux personnes aveugles ou malvoyantes des œuvres conformément à ses obligations,
- Financement de la formation des auteurs,
- Promotion des œuvres,
- Rémunérations versées aux auteurs d’œuvres cinématographique ou audiovisuelle,
- Redevances versées aux organismes de gestion collective.
3- Application du crédit d’impôt
Le crédit d’impôt est applicable prioritairement sur l’IS. S’il est supérieur à l’impôt alors il est remboursé au contribuable, mais attention le remboursement n’est pas automatique donc celui-ci doit en formuler la demande auprès du service des impôts des entreprises gestionnaire en remplissant le formulaire n°2573-SD.
4- Exemple
Une entreprise exerce une activité d’éditeur de services de télévision et réalise des dépenses de création audiovisuelle consistant en l’achat de droits de diffusion d’œuvre à une entreprise située en Allemagne pour une valeur de 50 000 euros, et elle est soumise à l’impôt sur les sociétés. Son chiffre d’affaires, sur la période du 1er mars 2019 au 31 décembre 2019, est de 800 000 euros puis il est de 640 000 euros sur la période du 1er mars 2020 au 31 décembre 2020. L’entreprise connait donc une diminution de son chiffre d’affaires de 20% ([(640 000 – 800 000) / 800 000] * 100).
Ici, l’ensemble des conditions sont respectées donc l’entreprise est éligible au crédit d’impôt. Ce dernier est égal à 15% des dépenses engagées pour l’achat de droits de diffusion soit 7 500€ (50 000 * 15%).
Si le chiffre d’affaires de l’entreprise en 2020 est de 640 000 euros et les charges s’élèvent à 340 000€, alors l’assiette de son bénéfice imposable s’élèvera à 300 000€, une fois le coefficient d’imposition normal appliqué de 26,5%, elle devra s’acquitter d’un IS d’une valeur de 79 500 euros. Une fois le crédit d’impôt d’un montant de 7 500 euros imputé, son imposition sera de 72 000 euros. Elle réalise donc une économie de la valeur du crédit d’impôt soit 7 500 euros.
Pour conclure, on peut se poser la question de savoir si ce crédit d’impôt est adapté aux nombreuses dépenses engagées par de multiples entreprises du monde de l’audiovisuel et cinématographique au vu des conditions restrictives.
Laura HERY et Centène LEFEBVRE