TVA et prestations parahôtelleries (CAA, Douai, 4ème chambre, 2 mars 2023)

Suit à un arrêt rendu par la Cour d’appel administrative de Douai, le Conseil d’Etat a été saisi pour avis sur la conformité du régime de TVA des prestations d’hébergement dites de « parahôtellerie » au regard des dispositions de la directive TVA.

L’activité de parahôtellerie s’entend de l’activité qui tend à offrir à des locataires de locaux, dans des conditions identiques à celles proposées par les hébergements à caractère hôtelier, au minimum trois des quatre prestations suivantes :

  • Le service de petit déjeuner selon les usages professionnels : dans les chambres/appartements ou dans un local aménagé dans l’immeuble ou l’ensemble immobilier ;
  • La réalisation du nettoyage régulier des locaux pendant toute la durée du séjour et de manière régulière ;
  • La réception des clients
  • La mise à disposition du linge de maison durant le séjour à l’ensemble des locataires.
  1. Rappel d’exonération de TVA pour les prestations de mise à disposition d’un local meublé ou garni, à titre onéreux

Au titre du 2° de l’article 261 D du Code général des Impôts (CGI), la location des locaux nus à usage d’habitation est exonérée de TVA, sans possibilité d’option pour leur imposition volontaire. Dans la continuité, le 4° de cet article 261 D CGI exonère également de TVA les activités de location de locaux meublés ou garnis à usage d’habitation, qu’elles soient occasionnelles, permanentes ou saisonnières.

Toutefois, sont exclues de l’exonération, donc soumises à la TVA, entre autres :

Les prestations de mise à disposition d’un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l’hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d’hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge et la réception, même non personnalisée, de la clientèle (article 261 D, 4° b CGI)

  1. Enjeu au regard de la directive TVA (2006/112/CE)

Par transposition de la directive TVA du 28 novembre 2006, les termes de l’article 135 paragraphe 2 assurent que l’exonération applicable aux locations immobilières doit être exclue pour « les opérations d’hébergement, telles qu’elles sont définies par la législation des Etats membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire ».

Cette directive vient réguler les dispositifs d’exclusion d’exonération de la TVA pour les activités de location meublée remplissant trois des quatre conditions susvisées. En effet, là où l’activité hôtelière est de facto soumise à application de la TVA, l’article 261 D 4° b du CGI permet une option pour la TVA par exercice d’une activité de parahôtellerie. L’option se heurte cependant à cette directive TVA.

  1. Les questions soumises au Conseil d’Etat

La Cour administrative d’appel de Douai a décidé de surseoir à statuer afin de soumettre au Conseil d’Etat deux questions soulevant selon elle une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges (Code de la justice administrative, art. L.113-1), auxquelles une réponse devrait en principe être apportée dans un délai de trois mois :

  • La condition tenant à la réalisation d’au moins trois des quatre prestations définies par l’article 261 D 4° b du CGI pour écarter l’application de l’exonération aux prestations de location de logements garnis ou meublés, réalisées à titre onéreux et de manière habituelle, est-elle conforme aux dispositions de la directive TVA ?
  • Dans la négative, la fourniture de seulement une ou deux de ces prestations est-elle suffisante pour écarter l’exonération de la prestation de location ?

Cette nouvelle mise en cause du régime n’est pas dérisoire. La taxation de plein droit de telles prestations se justifie, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE), par la nécessité d’appliquer à des opérations d’hébergement un régime similaire à celui des prestations fournies dans le secteur hôtelier. Les premières étant en concurrence potentielle avec ces dernières, on est ici sur un objectif de neutralité concurrentielle.

Il est à noter que l’avis du Conseil d’Etat permettra d’aborder pour l’ensemble des acteurs du secteur, les changements que pourrait entraîner le projet de directive « ViDA » (VAT in digital age) concernant les conditions d’application de la TVA aux prestations d’hébergement parahôtelier. Cet avis devrait permettre d’obtenir des précisions sur la définition de ces prestations, ainsi qu’une réforme pour soumettre à la TVA certaines prestations de courte durée proposées aux consommateurs par l’intermédiaire de plateformes électroniques de mise en relation.

Roshan ZEB

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